La phobie scolaire est un phénomène qui n’est pas si récent.
Si pour beaucoup d’enfants, l’école est un lieu de plaisirs dans lequel se construisent les liens sociaux et se fondent de nombreux apprentissages, pour d’autres, le simple fait de penser à l’école est un vrai calvaire.
Il semble que de plus en plus de cas de phobie scolaire sont annoncés. Pourtant le phénomène a été étudié dès le 19ème siècle !
Pédagogue et psychologue français, Alfred Binet fait mention dès 1887 de ces enfants, qui, souffrant d’une peur panique d’aller à l’école, se plongent dans un mutisme profond.
Malgré cette alerte précoce, c’est seulement en 1941 que le terme de phobie scolaire est officiellement posé.
A cette date, A.M. Johnson, psychiatre américaine, présente la phobie scolaire comme une « intense terreur associée au fait d’être à l’école ».
Pour elle, cette incapacité à se rendre à l’école est indépendante de la volonté de l’enfant.
En France, Julian de Ajuriaguerra (neuropsychiatre et psychanalyste) propose sa définition : « enfants, qui pour des raisons irrationnelles refusent d’aller à l’école et résistent avec des réactions d’anxiété très vives ou de panique quand on essaie de les y forcer ».
Pour autant, ce terme de « phobie scolaire » a été plusieurs fois remis en cause. A l’inverse de toute autre phobie dont l’origine est connue, ici, précisément, elle ne l’est pas.
En effet, il est rare d’en identifier la source, à savoir : les professeurs, les élèves, les cours, l’environnement ou tout autre facteur en lien avec l’école.
Reconnaître les signes de la phobie scolaire
L’avantage des signes de la phobie scolaire est qu’ils sont visibles. L’enfant va manifester clairement sa volonté de ne pas aller à l’école.
Il convient d’être attentif toutefois aux plus petits, qui ne diront pas qu’ils ont peur ou qu’ils souffrent, ils diront plus facilement qu’ils ont mal au ventre. Les douleurs apparaîtront notamment plus fréquemment le matin au moment du départ pour l’école.
Lorsqu’ils sont exprimés, les signes sont communs à tous les élèves en souffrance.
Ils éprouvent une vraie difficulté à quitter le domicile pour se rendre à l’école. Pour certains professionnels, c’est justement ce lien avec la séparation qui pourrait être en cause, notamment pour les plus petits.
Les élèves vont présenter un absentéisme scolaire complet. Anxieux et en panique, ils réagissent émotionnellement de manière violente.
L’enfant sera rassuré seulement lorsqu’il sera sûr qu’il n’ira pas à l’école.
Souvent, il s’engage à faire juste une pause et promet de faire l’effort de se rendre à l’école le lendemain. Et malheureusement, le lendemain l’histoire se répète…
A son apparition, la phobie scolaire touche vraiment exclusivement le lien avec l’école.
L’enfant qui en souffre sera, en revanche, tout à fait en mesure de poursuivre ses activités périscolaires. Il garde ses relations sociales.
Il est toutefois impératif d’écarter tout autre facteur, extérieur à la scolarité qui pourrait engendrer les mêmes caractéristiques de comportement. Le racket, la consommation de substances illicites, la dépendance aux jeux vidéo en sont des exemples.
L’élève qui souffre de phobie scolaire garde généralement son intérêt pour apprendre et sa curiosité naturelle.
Quels élèves sont touchés par la phobie scolaire ?
L’estimation du nombre d’élèves touchés par la phobie scolaire se situe entre 1 et 2% des enfants en âge d’être scolarisés. Le nombre de filles est plus important que le nombre de garçons.
Suivant les statistiques, il n’existe pas de profil type d’enfant avec phobie scolaire. Toutefois, il semblerait que les élèves sérieux et investis soient les plus sujets à ce phénomène.
Si la phobie scolaire peut apparaître à tout âge, certaines périodes semblent engendrer un plus grand nombre d’élèves touchés. L’entrée en CP et l’entrée au Collège, entre les classes de 6ème et de 4ème présentent un nombre plus importants d’élèves en situation de phobie scolaire.
Retentissements sur la vie de l’enfant
En raison du fort absentéisme, les notes vont fortement chuter et l’élève sera, à terme, déconnecté des apprentissages en cours. Cet absentéisme répété peut également conduire à une déscolarisation complète.
Sans accompagnement, l’enfant va pouvoir perdre confiance en lui et petit à petit se refermer sur lui-même. La phobie scolaire de l’adolescent, notamment, peut engendrer un isolement social partiel ou total.
Dans tous les cas, un repérage précoce des signes de phobie scolaire est primordial pour un accompagnement personnalisé et spécifique.
Accompagner l’enfant en situation de phobie scolaire
Traiter la phobie scolaire est très complexe et long.
Il est préconisé de mettre en place une thérapie individuelle et familiale.
Un Projet d’Accueil Personnalisé (PAI) peut être mis en place. Il s’agit de trouver un accord entre l’Equipe pédagogique, la famille et l’enfant pour que ce dernier puisse être scolarisé sur des périodes choisies. Dans tous les cas, la déscolarisation ou l’instruction à domicile doivent être le dernier choix. Réintégrer l’élève, même à faible fréquence lui permet de ne pas être complètement isolé et de garder un lien avec l’Ecole et les autres jeunes de son âge.
L’écoute, le soutien et la compréhension de l’enfant, du jeune en souffrance de phobie scolaire sont impératifs.
Il est capital que les Equipes pédagogiques et la famille constituent une véritable Equipe constructive autour de l’enfant. L’objectif est de maintenir l’élève en situation scolaire, quelle que soit la fréquence. La famille et l’Ecole dans laquelle l’élève est scolarisé doivent trouver un aménagement ensemble.
Il est important que tous les acteurs comprennent qu’il ne s’agit en aucun cas d’un caprice mais d’une vraie souffrance pour l’enfant. Le provoquer, le sermonner, ne fera qu’aggraver la situation. Un encadrement ferme et bienveillant pour lui donner, ou redonner confiance sera absolument de rigueur.
Provoquer un vrai changement, inscription dans un autre établissement par exemple, peut être également l’un des recours pour créer du renouveau et favoriser une nouvelle intégration.
Il peut arriver, cependant qu’il soit tout à fait impossible pour un jeune d’accepter un compromis, aussi faible en fréquence soit-il. Dans le seul cas où le PAI risquerait de fragiliser encore plus l’élève (mise en danger, fugue…), alors la déscolarisation arrive en dernier recours.
Le bien-être de l’enfant, du jeune, et sa confiance en lui restant l’enjeu majeur, tous les aménagements engagés devront prendre en compte ces aspects. Les parents devront puiser dans leur confiance en eux-mêmes et leur patience pour accompagner leur enfant à traverser cette étape difficile.